Ce mercredi 12 Janvier était l’occasion pour l’OTAN et la Russie d’enfin discuter et d’aborder le sujet de la sécurité en Europe. En effet, celle-ci est particulièrement menacée en raison de la situation critique observée en Ukraine et à sa frontière avec la Russie. Du fait de la remilitarisation de la frontière, avec l’envoi de quelques 100 000 soldats russes et la présence de chars, l’OTAN se devait de réagir face aux problèmes en convoquant les chefs d’État et les mettre devant le fait accompli : pouvons-nous assister à un conflit armé entre la Russie et l’Ukraine à avenir ? Bien que la crise soit réelle et les conséquences imminentes, le dialogue entre les deux entités a vite tourné au dialogue de sourds, la Russie légitimant leur intervention en réponse à l’invasion de l’OTAN sur sa zone d’influence et de l’autre côté la préoccupation occidentale d’une instabilité croissante au sein de l’Europe. Ce manque de coopération de la part des Russes est loin d’être de bon augure pour la suite, c’est pourquoi Josep Borrell a déjà envisagé “des sanctions coordonnées” à l’égard de la puissance russe

  1. L’élargissement de l’OTAN : le cœur du problème

Le cœur du problème réside donc dans l’avenir incertain de la sécurité en Union Européenne qui est susceptible de s’ébranler face à la situation en Ukraine et l’entêtement des Russes. Une des causes majeures de l’escalade des tensions est la question de l’élargissement de l’OTAN à des pays comme l’Ukraine, qui font partie intégrante de la sphère d’influence russe. Vladimir Poutine refuse justement une telle manœuvre de la part de l’OTAN et désire “reconstituer le glacis géopolitique soviétique en Europe” selon les propos de Josep Borrell, le Haut Représentant de l’Union Européenne pour les affaires étrangères et la politique de sécurité. Depuis l’annexion de la Crimée par les Russes en 2014, les relations entre le couple OTAN/UE et la Russie sont déplorables et à leur plus bas niveau : l’UE a de son côté toujours exprimé sa volonté d’élargissement et le seul obstacle qui freine l’accomplissement de cet objectif se trouve à la frontière russe. La Russie refuse toute inférence et interférence extérieure sur sa zone d’influence dans la mesure où elle estime y avoir des intérêts vitaux notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en gaz. L’inquiétude russe face à l’élargissement de l’OTAN n’est pas récente : elle a toujours été une préoccupation majeure pour le Kremlin et avec des actions de plus en plus concrètes de la part de l’Occident (la volonté des États-Unis d’installer des bases militaires dans les anciennes républiques soviétiques non membre de l’Organisation, promouvoir et développer une aide militaire conjointe…). Face à ce problème, une question essentielle se pose :  Est-on sur le point d’assister à un conflit armé à la frontière russo-ukrainienne ? Comment l’OTAN peut-elle se préparer à une telle éventualité ?

 II. Une rencontre aux enjeux conséquents 

« Aucune concession ne sera faite ». Telle est la déclaration de la Russie au sujet de ces négociations, et cela a rapidement annoncé la couleur des rencontres, qui n’ont encore débouché sur aucune solution, entre les responsables des Affaires étrangères russe, Sergueï Riabkov, et états-unien, Wendy Sherman. En effet, les deux puissances possèdent chacune leurs propres objectifs : les Etats-Unis souhaitent étendre leur zone d’influence en Europe de l’Est tandis que la Russie souhaite conserver la sienne. Ces velléités contraires mènent alors au problème que l’on observe en Ukraine et aux rencontres qui s’en sont suivies. Comme dit précédemment, pour les Etats-Unis, l’objectif est simple : élargir le Traité de l’Atlantique Nord vers l’Europe de l’Est pour monter, à terme, un projet de défense entièrement européen, et, par la même occasion, étendre son influence dans une zone longtemps monopolisée par la Russie et l’ex-URSS. Cependant, la Russie ne voit pas cet élargissement de l’OTAN d’un bon œil. En effet, les années ayant suivi la chute de l’URSS n’ont pas été pas bénéfiques pour la Russie puisqu’elle a perdu une grande partie du contrôle qu’elle exerçait autrefois sur les pays de l’Europe de l’Est, ainsi, céder face à l’intégration de l’Ukraine à l’OTAN ne serait qu’une humiliation de plus que Vladimir Poutine n’est pas prêt à accepter. Dès lors, il est important de constater que le président russe entend bien rétablir la grandeur passée de la Russie, notamment en faisant directement face à l’hyperpuissance états-unienne et en négociant d’égal à égal. De plus, l’objectif russe est aussi de conserver sa géopolitique des états-tampons et d’éviter ainsi une situation de “citadelle assiégée” que la Russie veut éviter depuis l’intégration, vécue comme une humiliation, des pays baltes à l’OTAN en 1999. 

Toutefois, si la Russie semble en position de faiblesse dans ces négociations, il ne faut pas oublier que l’attention des Etats-Unis reste avant tout tournée vers la Chine, ainsi, se lancer dans un conflit armé avec la Russie, certes moins bien équipée, ne tournerait pas à leur avantage puisque l’effectif total serait diminué, laissant donc l’hyperpuissance à la merci de la République Populaire. Bien sûr, la République Fédérale de Russie en a bien conscience et compte jouer sur cette corde sensible pour faire plier les Etats-Unis, même si ce coup de bluff pourrait aussi se retourner contre elle.

III. Quel avenir pour l’Ukraine ?

L’avenir Ukrainien reste incertain, car, tandis que la menace d’un conflit armé plane au-dessus du pays, ce dernier reste en dehors des négociations. En effet, si l’Ukraine, selon les dires de la Russie, est “inféodée” aux Etats-Unis, il vaut alors mieux de s’attaquer au cœur de l’Empire sans inclure les intermédiaires. Le président Ukrainien, Volodymyr Zelensky a tenté de proposer une réunion tripartite pour évoquer les problèmes et des solutions,  mais cette invitation a été balayée par les deux grandes puissances.  Dès lors, deux choix s’offrent à l’Ukraine : rejoindre les rangs de l’OTAN et risquer un conflit à la fois civil (puisqu’une partie de l’Ukraine est pro-Russe) et avec la Russie ou capituler devant cette dernière en refusant l’intégration au Traité Atlantique Nord et attendre que les affaires se tassent. Notons que l’Ukraine a déjà opté pour la deuxième option lors de l’annexion de la Crimée. Cependant, une autre solution beaucoup plus plausible commence à voir le jour : la mise en place des accords de Minsk, qui prévoient d’accorder une certaine autonomie à la région du Donbass et du Lougansk tout en leur octroyant un statut juridique particulier. En effet, la mise en place de ces accords pourrait contenter les Russes et ainsi permettre d’apaiser la situation. Toutefois, ces derniers sont bloqués par Kiev depuis 2015, car ils ne lui sont nullement bénéfiques. Les États-Unis et la Russie pourraient alors forcer la main à l’Ukraine pour qu’elle accepte les termes du Traité et mener à une désescalade du conflit au détriment de Kiev, victime involontaire de ce problème.

            Les négociations russo-étasuniennes, débutées le 10 janvier à Genève, n’ont toujours pas vu naître de solutions concrètes pouvant mener à un apaisement des tensions. Si les Etats-Unis veulent étendre leur zone d’influence en intégrant l’Ukraine à l’OTAN, la Russie a quant à elle montré son désaccord et compte confronter l’hyperpuissance en face-à-face pour laver les affronts qu’elle a trop longtemps subis. Quant à l’Ukraine, victime collatérale de ce conflit d’influence, elle n’a pas voix au chapitre et se retrouve prise entre deux feux et risque, en plus, de devoir ratifier des accords de Minsk qui ne lui sont en aucun cas bénéfiques. Si cette option est préférée à la mise en place d’une vraie entente entre la Russie et les Etats-Unis, encore une fois, les tensions s’accumuleront jusqu’à éclater à nouveau lors d’un prochain conflit et cela se réitérera sans jamais voir naître une véritable coopération

The Ukrainian situation and the negotiations between the United States and Russia: a dialogue doomed to failure or a step towards cooperation?

The NATO meeting of last January the 12th, was an opportunity for NATO members and Russia to finally discuss and address the issue of security in Europe. Indeed, it is particularly threatened because of the critical situation in Ukraine and on its border with Russia. Due to the remilitarization of the zone, with the dispatch of some 100,000 Russian soldiers and the presence of tanks, NATO had to react to the problems by summoning the heads of state and confronting them with the given fact: is an armed conflict between Russia and Ukraine possible in the future? Although the crisis is real and the consequences imminent, the dialogue between the two entities quickly turned into a standoff, with Russia legitimizing their intervention in response to NATO’s invasion of its zone of influence and the West’s concern about growing instability in Europe. This lack of cooperation on the part of the Russians does not bode well for the future, which is why Josep Borrell has already considered « coordinated sanctions » against the Russian power.

  1. The NATO enlargement: at the heart of the problem

The heart of the problem lies in the uncertain future of security in the European Union, which is likely to be undermined by the situation in Ukraine and the stubbornness of the Russians. One of the major causes of the escalation of tensions is the question of the enlargement of NATO to countries like Ukraine, which are an integral part of the Russian sphere of influence. According to Josep Borrell, the High Representative of the European Union for Foreign Affairs and Security Policy, Vladimir Putin refuses such a move by NATO and wants to « reconstitute the Soviet geopolitical glacis in Europe ». Since the Russian annexation of Crimea in 2014, relations between on one side NATO and the EU and on the other Russia, have been deplorable and at their lowest level. The EU has always expressed its desire for enlargement and the only obstacle that hinders the achievement of this goal is on the Russian border. Russia refuses any outside interference in its area of influence, as it considers that it has vital interests there, particularly in regards of gas supplies. The Russian concern about the enlargement of NATO is not recent: it has always been a major preoccupation for the Kremlin and with increasingly concrete actions on the part of the West notably with the willingness of the United States to install military bases in the former Soviet republics that are not members of the Organization, promoting and developing joint military aid…. Faced with this problem, an essential question arises: Are we about to witness an armed conflict on the Russian-Ukrainian border? How can NATO prepare for such an eventuality?

  1. A meeting with high stakes 

« No concessions will be made ». It is what Russia declared about these negotiations, and it has quickly set the tone for the meetings, which have not yet led to any solution between the Russian Foreign Minister, Sergei Riabkov, and the American Foreign Minister, Wendy Sherman. Indeed, the two powers each have their own objectives: the United States wishes to extend its zone of influence in Eastern Europe, while Russia wishes to preserve its own. These conflicting goals lead to the problem in Ukraine and the ensuing meetings. As previously mentioned, for the United States, the objective is simple: to enlarge the North Atlantic Treaty towards Eastern Europe in order to set up, in the long term, a complete European defense project, and, at the same time, to extend its influence in a zone that has long been monopolized by Russia and the former USSR. However, Russia does not see this enlargement of NATO in a good light. Indeed, the years following the fall of the USSR have not been beneficial for Russia, since it has lost a large part of the control it once had over the countries of Eastern Europe. Therefore, accepting the integration of Ukraine into NATO would only be another humiliation that Vladimir Putin is not ready to accept. It is important to note that the Russian president intends to restore Russia’s former greatness, notably by directly confronting the American hyperpower and by negotiating as equals. Moreover, the Russian objective is also to preserve its buffer-state geopolitics and thus avoid a siege mentality situation that Russia has wanted to avoid since the integration of the Baltic States into NATO in 1999, which was seen as a humiliation.

However, if Russia seems to be in a weak position in these negotiations, it should not be forgotten that the attention of the United States is primarily focused on China, so launching into an armed conflict with Russia, which is certainly less well equipped, would not turn to their advantage since the total number of troops would be reduced, thus leaving the hyperpower at the mercy of Beijing. Of course, the Federal Republic of Russia is well aware of this and intends to play on this sensitive cord to make the United States bend, even if this bluff could also turn against it.

  1. What future for Ukraine?

The future of Ukraine remains uncertain. While the threat of an armed conflict hovers over the country, the latter remains outside the negotiations. Indeed, if Ukraine, according to Russia, is « subservient » to the United States, then it is better to attack the heart of the Empire without including the intermediaries. The Ukrainian president, Volodymyr Zelensky, proposed a tripartite meeting to discuss the problems and solutions, this invitation was swept aside by the two great powers.  From then, Ukraine has two choices: to join NATO and risk a conflict both civil (since part of Ukraine is pro-Russian) and with Russia, or to capitulate to the latter by refusing to join the North Atlantic Treaty and wait for things to settle down. Note that Ukraine has already opted for the second option when annexing Crimea. However, another much more plausible solution is beginning to emerge: the implementation of the Minsk agreements, which provide a certain degree of autonomy to the Donbass and Lugansk regions while granting them a special legal status. Indeed, the implementation of these agreements could satisfy the Russians and thus allow to calm the situation. However, these agreements have been blocked by Kiev since 2015, as they are in no way beneficial to the country. The United States and Russia could then force the hand of Ukraine to accept the terms of the Treaty and lead to a de-escalation of the conflict to the detriment of Kiev, an involuntary victim of this problem.

The Russian – American negotiations, which began on January 10th in Geneva, have still not produced any concrete solutions that could lead to an easing of tensions. While the United States wants to extend its zone of influence by integrating Ukraine into NATO, Russia has shown its disagreement and intends to confront the hyperpower face-to-face to wash away the affronts it has suffered for too long. As for Ukraine, a collateral victim of this conflict of influence, it has no say in the matter and finds itself caught in the crossfire, with the added risk of having to ratify the Minsk agreements which are in no way beneficial. If this option is preferred to the establishment of a true agreement between Russia and the United States, once again, tensions will build up until they erupt again in the next conflict, and this will be repeated without ever seeing the birth of true cooperation.

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