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La vague de migrants haïtiens ayant gagné les États-Unis en début de semaine dernière n’est pas sans lien avec les perturbations que rencontre Haïti. En effet, ce pays des Antilles doit faire face une nouvelle fois à des défis à trois échelles : politique, environnemental et de sécurité. Les trois étant corrélés et entretenant le pays dans une crise de laquelle il semble difficile de sortir.

Un pays pauvre

Haïti, ancienne colonie française jusqu’en 1804, est situé dans les Grandes Antilles. Le territoire, bien que n’étant pas étendu, compte tout de même près de 11 millions d’habitants. Il s’agit d’un Pays Moins Avancé (PMA) dont l’Indice de Développement Humain reste très bas et le chômage élevé pouvant atteindre 70% en période de crise comme aujourd’hui et l’activité du pays concerne en majorité le secteur primaire.

Une crise politique 

Suite à l’assassinat du président Jouvenel Moïse cet été, des tensions ont ressurgi dans le pays. En effet l’enquête, loin d’avancer, devient un enjeu politique avec à la clef la succession au poste de chef d’État. Dans cette agitation générale Bed-Ford Claude, le procureur général, a été limogé pour « faute grave » après ses accusations envers le Premier ministre, Ariel Henry, qui aurait eu des conversations téléphoniques compromettantes l’impliquant dans le meurtre. 

Ariel Henry ne s’est pas encore exprimé publiquement concernant ces accusations à son égard mais a reçu le soutien de la communauté internationale qui encourage dans un même les politiques du pays à se tourner vers un accord consensuel.

Afin de répondre à cette demande, une nouvelle Constitution est en phase d’être adoptée. Cette dernière devrait permettre notamment d’éviter la paralysie de l’action gouvernementale et de lutter contre la corruption endémique.

Des failles de sécurité

L’assassinat du président Jovenel Moïse n’a fait que rendre l’évolution de la situation sécuritaire encore plus incertaine en octroyant le pouvoir à des gangs criminels qui rendent un retour à la normale difficilement envisageable puisque l’insécurité entrave toute perspective de reprise économique.

Le pays doit faire face à la recrudescence de violences entre groupes armés durablement implantés et actifs dans plusieurs zones du pays, notamment dans la capitale et ses environs, procédant régulièrement à des enlèvements, des meurtres et aux blocages des terminaux pétroliers du pays.

Des catastrophes naturelles à répétition 

Haïti est situé sur une faille sismique du fait de sa localisation entre deux plaques tectoniques : la plaque nord-américaine au nord et la plaque caraïbe au sud.

C’est en partie ce qui fait d’Haïti le pays le plus vulnérable aux catastrophes naturelles dans la région caribéenne selon l’Indice de Gestion des Risques mais pas seulement. L’aspect dévastateur des catastrophes naturelles de la région s’explique aussi par six facteurs qui se combinent : physiques, sociaux, économiques, politiques, culturels et environnementaux. En d’autres termes, au-delà de l’aspect récurrent des troubles environnementaux, Haïti rencontre des difficultés pour faire face à ces derniers en matière de prévention des risques au désastre ce qui ne fait qu’enfouir un peu plus le pays dans la misère.

C’est dans ce contexte qu’aux problèmes de gouvernance s’est ajouté, le 14 août dernier, un nouveau séisme de magnitude 7,2 sur l’échelle de Richter particulièrement dévastateur dans le sud de l’île. Le bilan de ce dernier est de 2 248 morts, près de 13 000 blessés et plus de 300 disparus alors même que le traumatisme qu’ont représenté le séisme de 2010 et l’ouragan Mathew de 2016 est encore tangible.

Économiquement parlant, avec cette catastrophe, le pays a perdu l’équivalent de 8 milliards de dollars (soit 120% de son PIB avant) et la majorité de la population se retrouve sans aide. En effet, Haïti traverse l’une des plus grandes crises alimentaires du monde, avec 4,4 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë.

Des migrations de masse

De cette situation délicate dans le pays en découle une volonté pour les Haïtiens de fuir du pays.

Plusieurs milliers de migrants haïtiens ayant franchi la frontière mexicaine se sont réunis aux abords d’un pont au Texas en début de semaine dernière. Le gouvernement américain a accéléré le processus d’expulsion, en annonçant en parallèle qu’il allait augmenter le quota de réfugiés admis aux États-Unis, de 62 500 à 125 000.

Les images de ces expulsions en connaissance du contexte à Haïti ont provoqué de vives réactions, amenant même l’émissaire américain en Haïti, Daniel Foote, a démissionné pour dénoncer les expulsions « inhumaines » par les États-Unis.

Conclusion

Plus que jamais, la situation Haïti est préoccupante et la mobilisation des acteurs extérieurs est essentielles en cette période de crise.

Le défi est de tirer profit de la trêve informelle observée par les bandes armées pour secourir les quelques 600 000 personnes en besoin d’aide.

Il s’agit également de ne pas reproduire les erreurs du passé et de se questionner sur l’avenir de Haïti qui semble ne pas parvenir à se sortir du gouffre dans lequel il est plongé. Quelles solutions dès lors proposer pour sortir la tête de l’eau de ce pays ?

Haiti: between political trouble and insecurity

The massive influx of Haitian migrants into the United States early last week is not unrelated to the problems in Haiti. Indeed, this Caribbean country is facing once again challenges on three levels: political, environmental and security. The three are correlated and keep the country in a crisis from which it seems difficult to emerge.

A poor country

Haiti, a former French colony until 1804, is in the Greater Antilles. Although the territory is not large, it has a population of almost 11 million. It is a Least Developed Country with a very low Human Development Index and high unemployment, which can reach 70% in times of crisis such as today.

A political crisis

Following the murder of President Jovenel Moïse this summer, tensions have resurfaced in the country. Indeed, the investigation, far from making progress, is becoming a political issue with the succession to the head of state at stake. In this general turmoil Bed-Ford Claude, the attorney general, was dismissed for « serious misconduct » after his accusations against the Prime Minister, Ariel Henry, who allegedly had compromising telephone conversations implicating him in the murder.

Ariel Henry has not yet spoken publicly about the accusations against him but has received support from the international community, which is encouraging the country’s politicians to move towards a consensual agreement.

To meet this demand, a new constitution is being adopted. It should prevent the paralysis of government action and fight against endemic corruption.

Security gaps

The murder of President Jovenel Moïse has only made the evolution of the security situation even more uncertain by granting power to criminal gangs who make a return to normality difficult to envisage since insecurity prevents any prospect of economic recovery.

The country must deal with the resurgence of violence between armed groups that are permanently established and active in several areas of the country, particularly in the capital and its surroundings, regularly carrying out kidnappings, murders, and blockades of the country’s oil terminals.

Recurrent natural disasters

Haiti is situated on a seismic fault line due to its location between two tectonic plates: the North American plate to the north and the Caribbean plate to the south.

This is part of what makes Haiti the most vulnerable country to natural disasters in the Caribbean region according to the Risk Management Index, but it is not the only reason. The devastating character of the region’s natural disasters can be explained by a combination of six factors: physical, social, economic, political, cultural, and environmental. In other words, beyond the recurrent aspect nature of the environmental problems, Haiti has difficulty in dealing with them in terms of disaster risk reduction, which only serves to plunge the country further into misery.

It is in this context that, on 14 August, a new earthquake of magnitude 7.2 on the Richter scale was added to the problems of governance, particularly devastating in the south of the island. The death toll was 2,248, with nearly 13,000 injured and more than 300 missing, even though the trauma of the 2010 earthquake and Hurricane Mathew in 2016 is still noticeable.

Economically speaking, with this disaster, the country has lost the equivalent of 8 billion dollars (120% of its GDP before) and most of the population is left helpless. Indeed, Haiti is facing one of the world’s biggest food crises, with 4.4 million people in the country facing acute food insecurity.

Mass migration

This delicate situation in the country has led to a desire for Haitians to leave the country.

Several thousand Haitian migrants who crossed the border toward Mexico gathered at a bridge in Texas early last week. The US government accelerated the deportation process, announcing while it would increase the quota of refugees admitted to the US from 62,500 to 125,000.

The images of these expulsions in the knowledge of the context in Haiti provoked strong reactions, even leading the US envoy to Haiti, Daniel Foote, to resign to denounce the « inhumane » expulsions by the US.

Conclusion

More than ever, the situation in Haiti is alarming and the mobilization of external actors is essential at this critical time.

The challenge is to take advantage of the informal truce observed by the armed gangs to help the 600,000 people in need of aid.

It is also a question of not repeating the past mistakes and of questioning the future of Haiti, which does not seem to be able to pull itself out of it. So, what solutions can be proposed to get out of this situation?

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